Parution simultanée en mai 2025

«Tu as engagé une illégale pour s’occuper de tes enfants?!» La narratrice tombe des nues lorsqu’elle apprend que son amie emploie une sans-papiers. Mais avec l’histoire de Gloria, la babysitter camerounaise, puis celle de Mohammed, un demandeur d’asile débouté, sa stupeur va laisser la place à de nouvelles questions: comment des sans-papiers peuvent-ils payer assurances sociales et impôt à la source, tout en se voyant refuser le droit d’exister légalement? Comment des employeurs peuvent-ils recruter des travailleurs illégaux, et s’en sortir impunément? Avec ce sixième roman, Isabelle Flükiger nous emmène dans une Suisse de l’ombre où la justice n’est pas le droit, et où la loi ne dit pas toujours ce qu’elle fait. Un récit entre enquête et fiction aussi percutant qu’instructif.

De la naissance à la mort, nos vies sont régies par la loi. C’est à partir de cette évidence que j’ai imaginé ce roman : la loi y tient le rôle que l’Histoire joue dans un roman historique. Ici, c’est donc la loi qui structure le destin de mes personnages, et le destin de mes personnages permet de raconter la loi. Je le définis comme un « roman juridique ». En espérant qu’il permette de rapprocher le citoyen de cet appareil législatif qui gouverne nos vies.
Extraits de presse
Thierry Raboud, La Liberté (entretien)
Qu’une écrivaine dédie un livre aux sans-papiers n’a, en soi, rien de trop surprenant. Mais qu’elle se plonge, dix ans durant, dans les liasses législatives qui condamnent leur présence tout en s’accommodant de leur travail, voilà qui est plus inhabituel. Après son Retour dans l’Est (2017), récit familial sur les traces de son ascendance roumaine, Isabelle Flükiger a appris une autre langue pour dépeindre Une Suisse au noir: celle du droit, si spécialisée que peu en comprennent les subtilités ni les implications, et qui pourtant régit l’existence de 100 000 à 200 000 personnes considérées comme illégales dans notre pays.
Aline Andrey, L’événement syndical
« S’il se veut fictionnel, le roman Une Suisse au noir mêle habilement la vie d’une migrante camerounaise travaillant dans l’économie domestique et celle d’un jeune ouvrier marocain œuvrant dans la construction. Tous deux vivent en Suisse romande, sans statut légal. L’une fait partie des sans-papiers, l’autre est un requérant débouté. Ces deux personnages créés par l’écrivaine fribourgeoise Isabelle Flükiger pourraient tout aussi bien exister. Forte de nombreux témoignages, elle donne vie à Gloria et à Mohammed avec finesse et justesse, loin des clichés. Tout en plongeant dans leur existence, on découvre également la face sombre, les failles et les incohérences du système, des assurances maladie à l’AVS, en passant par les contrôles sur les chantiers, la sous-traitance et les faillites en cascades. Ne reculant ni devant des textes de loi ni des rapports administratifs complexes, l’écrivaine signe une enquête rigoureuse, documentaire, tout en emmenant le lecteur dans sa propre quête dans les coulisses d’un système inique. »
Charles Linsmayer, 20 Minuten online (original en allemand)
Dans son roman brillamment traduit par Ruth Gantert, l’autrice raconte bien plus que l’histoire de deux personnages : elle montre aussi dans quelle zone grise légale vivent ces « sans-papiers », dont l’économie tire profit sans jamais leur offrir de perspective.
Malgré la sobriété du récit, on referme le livre profondément touché, en se demandant ce qui devrait changer pour que des personnes comme Gloria et Mohammed puissent trouver leur place et leur bonheur parmi nous.
Carine Meier, Freiburger Nachrichten (original en allemand)
Gloria. Mohammed. est ainsi un roman à la fois captivant et éclairant – mais jamais moralisateur – sur un sujet dont on parle peu dans la société suisse.
Avec ce récit à la première personne, Isabelle Flükiger crée une forme nouvelle, particulièrement apte à rendre accessibles, avec justesse et sensibilité, des thèmes difficiles.
Tina Uhlmann, Keystone-SDA (original en allemand)
Isabelle Flükiger avait enregistré plusieurs dizaines de versions de son texte sur son ordinateur. Dans celle que nous lisons aujourd’hui, elle parvient admirablement à trouver un équilibre entre les faits juridiques ou politiques et les biographies fictionnalisées de Gloria et Mohammed.
L’un ne sert pas de cadre à l’autre : les deux dimensions sont racontées sur un pied d’égalité, en alternance, et ponctuées de commentaires de l’autrice sur sa propre démarche.
Ces passages, légers et parfois amusants, apportent une respiration bienvenue. On remarquera aussi le soin avec lequel Flükiger évite tout jugement de valeur : elle se contente de documenter la réalité avec neutralité, laissant les faits et les personnages parler d’eux-mêmes.